La vie est un mouvement circulaire immuable : naissance, vie, mort. Et on recommence. Naître, vivre, mourir et… nourrir les vivants. Le cycle de la vie pourrait donc se résumer par « vie + changement = équilibre ». Au regard de cette impermanence du quotidien, chaque être humain devrait donc être rompu à l’exercice et surfer sur le changement le plus naturellement du monde !

Mais pourquoi donc, lorsque nous nous lançons en affaires, et alors même que nous recherchons la nouveauté, notre cerveau d’hominidé finit toujours par refuser ce qui lui fait perdre son confort ?

Pourquoi, alors que nos idées sont lumineuses (partir en affaires, lancer un nouveau produit/service, déménager, voire changer de pays…) et que nous dessinons la promesse d’un avenir meilleur, ça ne va pas forcément bien ? Pourquoi le doute nous envahit et nos peurs profondes et sournoises se manifestent-elles intensément ? L’explication est neuroscientifique !

 

Notre cerveau : ce ringard anti-changement

Oui, cher.es travailleur.ses autonomes, cher.es entrepreneur.es, votre cerveau est une larve feignasse qui aime ce qui ne lui demande pas d’efforts. Ironiquement, il vit aussi dans un monde en perpétuelle évolution : imaginez donc la panique lorsqu’il prend des risques !

C’est un fait : être entrepreneur, c’est une aventure formidablement schizophrène. C’est incarner une entreprise et gérer tous les domaines de celle-ci. C’est monter très vite en compétences intellectuelles. C’est jongler habillement entre sa sphère personnelle et professionnelle : enfant malade, conjoint en déplacement, panne de voiture, collaborateurs pressés, problèmes de trésorerie, retard de paiement, charges, flux, etc. C’est construire ses valeurs en étant engagé auprès de ses clients, en les accompagnant et en les formant. C’est grisant, challengeant. Votre tête bouillonne mais se ment : votre cerveau est en réalité anti-changement.

« Je gère ! » : cette phrase, on se la répète tous… pourtant on court souvent tout droit vers le burn out. « On gère » intellectuellement. Celui qui nous dit que cela ne va pas, c’est notre corps, mais nous ne l’écoutons pas. Nous sommes dans le déni, dans l’urgence, dans une sélection des priorités et une évaluation faussée, biaisée de nos compétences. C’est tout ceci qui entre en jeu dans notre rapport au changement. Nous croyons « gérer », mais pas tant que ça. Et notre cerveau n’aime pas !

 

Cerveau + changement = déséquilibre

Plongeons à présent dans les méandres de la neuroscience pour comprendre. Notre cerveau est un rassemblement de neurones qui flottent gaiement dans une gelée curieuse composée des cellules gliales. À notre naissance nous avons 100 milliards de neurones dans la tête, 40 000 dans le cœur et 200 millions dans les tripes. Chaque neurone a entre 1 000 et 10 000 connexions avec ses congénères.

La principale fonction du cerveau est d’assurer notre survie, d’être à même de fuir, de se défendre ou de se faire tout petit face au danger. En neuroscience, nous distinguons trois zones de gouvernances principales pour prendre des décisions et faire au mieux pour ne pas y laisser des plumes : le reptilien, le limbique et le cortex préfrontal. 

Le cerveau reptilien : la survie physique

À l’origine, nous sommes des animaux, ne l’oublions pas. Soit nous mangeons, soit nous sommes mangés. Basique. Pour assurer notre survie, notre cerveau a besoin d’être en alerte permanente. Il doit être capable de percevoir le maximum d’indices, de stimuli autour de lui pour réagir : notre cerveau reptilien est un radar à danger. Remercions-le ! Il s’agit de la seule partie mature du cerveau dès notre naissance.

Le cerveau limbique et para limbique : la survie sociale

Cette partie du cerveau n’arrive à maturité que vers l’âge de 7 ans et c’est ici que siègent nos automatismes (ce qui aide pour écrire ou faire du vélo), nos émotions, nos peurs, nos croyances limitantes. Notre survie sociale se traduit par notre capacité à être aimé, apprécié, intégré dans les réseaux, ressentir des émotions, se conformer à la société, à notre éducation, à nos valeurs. C’est ici que le changement crée un déséquilibre. Cette partie du cerveau flippe en permanence ! C’est notre radar à problèmes, générateur d’angoisses, d’anxiété, de grand stress.

Explications.

Cognitivement, nous réclamons le changement car ce que nous vivons ne nous convient pas : pas assez payé, emploi qui manque de sens, rythme de vie épuisant, ennui, routine. Tant de raisons qui font qu’il est vital de changer (ce qui est figé, c’est ce qui est mort). La théorie, nous l’avons : nous voulons que ça change et c’est le principal moteur des destins entrepreneuriaux.

Alors pourquoi ça bloque ? Pourquoi ce n’est pas le bonheur ? Pourquoi cette sensation de vertige, de déséquilibre, d’instabilité ? Parce que le changement en action va à l’encontre de notre cerveau limbique et para limbique qui s’accroche à ses croyances, à sa zone de confort. Afin d’assurer nos survies, le cerveau est pessimiste, focalisé sur le danger permanent comme évoqué plus haut.

Alors oui : il râle, il stresse face à tout ce qui change et évolue autour de lui alors qu’il ne l’a pas décidé. Il découvre un rythme de vie où rien n’est figé, avec de nombreux facteurs de risque : le quotidien de l’entrepreneur ! Malgré toute notre bonne volonté, sa réaction première (pour ne pas dire primitive) sera un « NON » tonitruant et catégorique ! Chaque changement demande une adaptation voire une hyper adaptation : il n’aime pas ça. Le changement doit être ce qu’il décide et non ce qui lui est imposé. Il va alors rechercher de la stabilité, du rationnel, de la permanence. C’est rassurant.

Cette réaction est un automatisme entre nos neurones : ce sont eux qui nous freinent, ce sont eux qui altèrent la santé de l’entrepreneur.

Le cortex préfrontal : notre option « sérénité »

Et s’il était possible de hacker notre cerveau pour mieux vivre le changement, entre équilibre et stabilité ? Ceci est possible grâce à notre cortex préfrontal, siège de notre intelligence adaptative.

Connaissez-vous cette fameuse image d’un leader face à une foule ? Il demande « qui veut du changement ? » et tout le monde lève la main. Puis il pose une deuxième question : « qui est prêt à changer ? ». Personne ne lève la main. Face à lui, tous les reptiliens et limbiques de l’assistance se sont figés, morts de trouille de sortir de leur confort, de perdre le contrôle et d’aller vers l’inconnu. INCONNU = PANIQUE.

« On sait ce qu’on perd, on ne sait pas ce qu’on gagne ! » : ceci n’est pas une fatalité !

Et si vous preniez soin de vous en musclant votre cortex préfrontal pour renverser votre vision du changement ? C’est ainsi que j’ai créé l’astuce PAUSE : Penser Autrement Une Situation Embêtante. Comment ça fonctionne ?

  1. Vous arrêtez tout : il est primordial de stopper le mode automatique dans lequel vous plongez dès que l’instabilité et le déséquilibre pointent le bout de leur nez. Arrêtez la course effrénée du hamster dans votre tête qui focalise sur ce qui est négatif et qui fait peur.
  2. Dites merci à votre cerveau de vous prévenir que ça ne va pas : votre cerveau n’est pas (totalement) maso ! Il vous prévient quand il n’est plus dans le confort ou ne va plus l’être. Remerciez-le pour cela. N’oublions pas que notre cerveau est d’abord construit pour nous sauver du danger.
  3. Activez votre cortex préfrontal pour regarder autrement la situation et prendre du recul : ce que vous vivez face à l’impermanence est angoissant. Prenez du recul et regardez ce qui se passe vraiment à l’instant T. Vous vous rendrez compte que vos angoisses se construisent sur des hypothèses et non sur du réel.
  4. Recommencez encore et encore : la bonne nouvelle c’est que plus vous prendrez l’habitude de faire cette gymnastique (cette bascule du limbique vers le préfrontal), plus cela deviendra un automatisme positif.

Nous avons besoin de 21 jours minimum pour commencer à changer, à assouplir une pensée, une peur. Au moins 30 jours pour en faire une habitude. Cela sous-entend d’y travailler quotidiennement ! Regardez votre changement droit dans les yeux. Observez-le. Plus vous en saurez sur lui, plus vous le détaillerez objectivement, et moins il sera déstabilisant. C’est comme cela que l’on prend du recul : en sortant de ses automatismes.

 

Travailleur.se autonome, entrepreneur.e, dirigeant.e, prenez soin de vos neurones, faites grandir votre potentiel et vos affaires en hackant votre cerveau (et en faisant un gros câlin à votre hamster intérieur !). Faites-vous ce cadeau et vous vivrez le changement du mieux que vous le pouvez !

 

Article par Claire Stride, conférencière, auteure, consultante
avehttps://clairestride.com/c la collaboration d’Aurélia Juif-Leclerc